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L’interleukine 34 (IL-34) est une cytokine exprimée par de nombreux tissus, néanmoins la peau constitue le site majoritaire de production d’IL-34, par les kératinocytes, où elle joue un rôle essentiel dans le développement et le maintien des cellules de Langerhans dans l’épiderme. Son expression et son rôle au cours de l’inflammation cutanée sont très peu décrits, bien que l’IL-34 ait été rapportée d’une part pour ses effets proinflammatoires dans certaines pathologies, d’autre part pour ses activités immunorégulatrices dans d’autres contextes physiopathologiques. Dans une première partie, nous nous sommes donc intéressés à l’étude de son expression cutanée en conditions saine et inflammatoire au cours du psoriasis et de son potentiel rôle tolérogène au niveau de la peau. Contrairement à la majorité des cytokines qui sont surexprimées en conditions inflammatoires, nous montrons que l’expression de l’IL-34 est réprimée dans les lésions de psoriasis par rapport à la peau saine, corrélée à une perte des cellules de Langerhans dans l’épiderme. A l’aide de modèles 2D et 3D de cultures de cellules épidermiques, nous démontrons in vitro que les niveaux d’expression de l’IL-34 sont étroitement liés à l’état de différenciation des kératinocytes et que les cytokines proinflammatoires, notamment celles qui altèrent la différenciation épidermique comme l’oncostatine M, sont responsables de la régulation négative de l’expression de l’IL-34. Enfin, le rôle régulateur de l’IL-34 a été mis en évidence par sa capacité à inhiber l’effet de l’oncostatine M sur le blocage de la différenciation épidermique. Dans une seconde partie, nous avons recherché un potentiel effet immunorégulateur de l’IL-34 sur d’autres cibles cutanées comme les cellules immunes résidentes ou infiltrant la peau. L’IL-34 ne semble pas influencer la différenciation in vitro des monocytes en cellules de Langerhans, ni leur capacité de cellules présentatrices d’antigènes, comme le montrent les résultats très variables obtenus lors de leur mise en cocultures avec des lymphocytes T naïfs. D’autres cocultures associant des cellules T régulatrices, cibles rapportées de l’IL-34, et des cellules T effectrices, ne montrent pas non-plus d’effet immunorégulateur de l’IL-34. Dans l’ensemble, nos résultats suggèrent que l’IL-34 n’a pas d’effet tolérogène sur les cellules immunes cutanées. Finalement, nous avons mis en évidence dans une troisième partie, une nouvelle source cutanée d’IL-34, le mélanocyte, qui présente une régulation opposée à celle des kératinocytes en condition inflammatoire. En effet, dans un modèle in vitro de mélanocytes inflammatoires mimant le vitiligo, nos résultats montrent une surexpression de l’IL-34 et des gènes caractéristiques de l’inflammation, une inhibition de l’expression des récepteurs de l’IL-34 ainsi que des gènes impliqués dans le fonctionnement des mélanocytes et la synthèse de mélanine. Des tests in vitro de stimulation de mélanocytes par l’IL-34 confirment que la cytokine ne semble pas moduler l’expression des gènes impliqués dans la physiologie des mélanocytes et n’entraîne pas d’augmentation de leur état inflammatoire. A l’inverse, nous montrons également une diminution globale de l’expression de l’IL-34 in vivo dans les zones péri-lésionnelles de peau de patients atteints de vitiligo. Ces résultats suggèrent que l’IL-34 relarguée par les mélanocytes, minoritaires par rapport aux kératinocytes dans l’épiderme, ne semble pas compenser leur diminution d’expression en condition inflammatoire, ni conférer de rôle protecteur particulier aux mélanocytes. En conclusion, l’ensemble de ces travaux permettent d’apporter de nouvelles connaissances sur l’expression, la régulation et les effets de l’IL-34 dans la peau humaine en conditions saine et inflammatoires.