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La perspective d'une augmentation de la population mondiale implique que la production alimentaire soit améliorée et mieux répartie dans le monde. Une alternative durable pour atteindre une production alimentaire élevée est une utilisation efficace des surfaces déjà cultivées. Le phosphore (P) est un élément nutritif essentiel à la production végétale dont les réserves naturelles sont menacées d'épuisement dans les prochaines décennies. L'utilisation adéquate de ce nutriment est donc nécessaire pour assurer la durabilité de l'agriculture et de l'environnement. Ainsi, ce travail s'inscrit dans le scénario d'augmentation de l'efficacité des engrais et de la production agricole et de maintien de l'équilibre dynamique des nutriments en visant la durabilité des systèmes agricoles, la sécurité alimentaire et la réduction du changement climatique. Par conséquent, l'objectif principal de ces travaux était d'établir une stratégie plus efficace de fertilisation au P pour augmenter la production de fourrage, le maintien de la communauté végétale et l'utilisation efficace du P. De même, nous avons testé l'effet des systèmes de gestion du sol sur la disponibilité et l'épuisement du P dans le sol et sa stœchiométrie avec le carbone et l'azote. Pour atteindre nos objectifs, nous avons analysé deux expériences de long terme. La première a été établie en 1997 dans une prairie naturelle du biome de la Pampa dans l’état du Rio Grande do Sul au Brésil. Le sol du site expérimental est un sol avec de faibles stocks de P total et disponible. Sur ce site, l’effet de différentes sources de P a été testé sur la production de matière sèche, l'efficacité de l'utilisation du P par les plantes et les changements botaniques. Le second site, établi en 2005, est situé sur le site expérimental de l’ORE ACBB de l’INRAe de Lusignan en France. Le sol du site expérimental présentait des stocks élevés de P total et disponible en raison d'une fertilisation historique avant l'expérience. Aucune fertilisation P n’a été réalisée depuis l’installation du site expérimental. Sur ce site, l'effet à long terme de deux systèmes de gestion (culture permanente et prairie permanente) a été mesuré par l'exportation de P, l'épuisement des stocks totaux de P, C et N du sol, le suivi de la disponibilité du P et les changements dans la stœchiométrie C:N:P du sol. La dynamique du P dans la biomasse microbienne du sol et les modifications du couplage P, C et N dans la taille des agrégats du sol ont également été suivies. Nous avons conclu que l'utilisation de sources de P soluble (comme le superphosphate simple et triple) associée au chaulage est une meilleure stratégie pour améliorer la production de matière sèche et l'efficacité d'utilisation du P dans les prairies de la Pampa. Ces engrais ont entraîné un léger changement dans la richesse des espèces ; cependant, il y a eu un plus grand renouvellement des espèces, principalement dans les groupes de graminées et de plantes fourragères et dans la contribution des légumineuses à la production de fourrage. Pour maintenir le rendement en matière sèche, un apport régulier de phosphore, ne dépassant pas trois ans, est nécessaire. L'utilisation de phosphates naturels (roches phosphatées) n'a pas permis d'améliorer la fertilité et la production de matière sèche de manière satisfaisante en raison de leur non-dissolution à long terme (plus de six ans). D'autre part, les prairies permanentes ont entraîné un plus grand épuisement des stocks totaux et P-labile en comparaison des cultures permanentes. De même, les prairies permanentes ont favorisé une transformation du P inorganique en P organique dans le pool le plus labile, accompagnant l'augmentation des stocks de C et de N dans le sol. La technique RMN 31P a permis d'observer que les prairies permanentes avaient un effet plus significatif sur la réduction de l'α-glycérophosphate et l'augmentation du myo-IHP et de l'adénosine monophosphate que les terres cultivées permanentes.